Imagine un tuyau aussi large qu’un État des U.S.A. et aussi long que la moitié de la Terre. Maintenant, imagine que ce tuyau est rempli d’un gaz chaud se déplaçant à 50 000 km/h. Puis imagine que ce tuyau n’est pas fait de métal mais d’un champ magnétique transparent. Tu viens de te représenter un jeune spicule parmi les milliers qui recouvrent le Soleil actif. La photographie ci-contre est peut-être l’image de plus haute résolution jamais prise de ces énigmatiques tubes de flux solaire.
Les spicules emplissent la photo ci-dessus de la région solaire active 10380 traversant le Soleil en juin 2013, ils sont particulièrement évidents sous l’aspect d’un tapis de tubes sombres sur la droite. Les spicules durent environ 5 minutes, naissant sous forme de longs tubes de gaz s’élevant rapidement puis s’éteignant à mesure que le gaz atteint sa plus haute altitude et retombe sur le Soleil.
Les spicules seraient le produit des ondes acoustiques qui traversent le Soleil. L’origine de ces jets de plasma qui partent de la partie supérieure de chromosphère solaire, à la vitesse de 20Km/s, et pénètrent la région extérieure de l’atmosphère solaire sur des milliers de kilomètres, sont encore grandement inexpliqués, bien qu’on les observe en permanence (quelque 100.000), essentiellement en raison de leur brièveté et de leur faible dimension.
Ces spicules n’ont pas plus de 500 km de diamètre et leur durée de vie va de cinq à dix minutes: après s’être élevés parfois jusqu’à 16.000 km, ils retombent et s’évanouissent avant de réapparaître, quasiment au même endroit et avec une même périodicité (Pour en savoir plus vois la vidéo jointe en cliquant sur l’image ci-dessus).
Le Soleil vibre en permanence, et selon plusieurs modes d’oscillation : les modes de gravité et les modes acoustiques (dits “modes p”), dus à la pression). Une étude scientifique a pu montrer que la périodicité des spicules était essentiellement due aux modes p de résonance du Soleil, de période identique (cinq minutes). Si ces oscillations de la surface de Solei s’évanouissent généralement avant d’atteindre l’atmosphère solaire, il arrive que, dans certaines conditions, elles l’atteignent. Elles engendrent alors une onde de choc qui propulse du plasma de la chromosphère et forme un spicule. En modélisant ce fonctionnement les chercheurs peuvent prévoir maintenant avec une grande précision l’apparition de ces spicules.
Les spicules emportent plus de cent fois la masse qui s’échappe en permanence du Soleil – électrons, protons et autres particules énergétiques, à raison de deux millions de tonnes par seconde : le vent solaire.
Avec cette modélisation, il va être maintenant possible d’étudier ce que représente, dans le vent solaire, la masse de plasma apportée par les spicules dans la couronne solaire. On pourra aussi mieux comprendre la formation de ce vent solaire qui parvient jusqu’à la Terre et au-delà, endommageant parfois au passage les satellites en orbite et perturbant gravement la haute atmosphère terrestre.